Conradi, Gustav, Lettre, 1933

Conradi est élève en philosophie, fils de pasteur ; il a 24 ans. Dans cette lettre fervente, où il déclare un amour intense pour Gide, et écrite dans un français remarquable, il fait état d’une lecture qui l’a bouleversé ; l’auteur du livre en question est Hans Blücher ; son ouvrage, Die Aristie des Jesus von Nazareth, il le trouve « cruel » ; sans que le signataire le dise franchement, il donne à penser que sa matière trouve écho dans les événements qui ont fait basculer l’Allemagne vers le nazisme, au début de la même année. Blücher, nous indique Conradi, croit qu’il est des « races primaires » et des « races secondaires », ces dernières n’étant sur terre que pour servir les premières, quitte à ce qu’elles périssent, en vertu même de leur statut de serve. Lui, avoue-t-il, il préfère « l’idée de la diversité » [souligné dans le texte]. Il préférerait encore, ajoute-t-il, que rien ne « périsse », que « chaque être après cette mort, comme on dit cette vie [reçoive] une forme qui corresponde à sa direction essentielle ». Que Gide lui réponde et il en sera heureux, mais s’il ne le fait pas qu’il soit assuré de son amour.