Coupure de presse, du 20 novembre 1947, signée Robert Kemp, intitulée : « André Gide, Prix Nobel », 1 feuillet imprimé, 6 colonnes.
Archive non numérisée – en savoir plus
Détails
Le critique du Monde donne, ici, toute sa mesure : il dispose de plus d’espace ; il invite donc son lecteur à « des propos ininterrompus […] et sans prétention ». C’est une recension serrée de l’œuvre de Gide, depuis ces « Nourritures terrestres [qui] ont secoué nos adolescences » à ces « récits brefs et poignants, L’Immoraliste, La Porte étroite, Isabelle ». Il apporte ensuite un souvenir personnel : « Je connaissais en ce temps-là un graveur russe suicidé pendant la guerre, rêveur effréné, enthousiaste de son propre talent, et, somme toute fort digne d’être aimé, qui obtint de M. Gide une séance de pose. Il me passait les livres de son modèle, que l’impécuniosité m’empêchait de collectionner. J’ai retrouvé ce personnage dans le Journal de Gide, accablé sous des moqueries et des sarcasmes. Du chagrin m’en est venu. Car la victime, l’imprévoyante victime, ne parlait que de la grâce, de la complaisance de son hôte. Il croyait à une fraternité intellectuelle. Pauvre Raphaël S… ! Je crois que M. Gide lui a fait don de l’immortalité. Ce don lui coûte cher… ». Pour Kemp, Gide aura été « un Proust classique, moins perdu dans les détails, moins enivré dans les sensations, moins romantiques ». Bref, que le Nobel échoit à Gide, c’est « envers et contre tous ; envers et contre lui-même ». C’est « un grand Français ». Et donc « échec aux Philistins ; échec aux Pharisiens »
Fondation Catherine Gide