Description
Lettre à André Gide, du 12 mars 1931, envoyée de Fort-Lamy, Tchad, 3 feuillets ms. R/V.
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Manuscrit
Notes
Marcel de Coppet se demande, s’il « n’est pas vain » d’avoir « donné toute sa vie à [ses] pauvres nègres ». Sans doute a-t-il tort, se corrige-t-il aussitôt. Depuis le passage de Gide en Afrique et sa dénonciation des compagnies, « d’indéniables résultats ont été obtenus ». Il nomme les gouverneurs de bonne volonté, comme Brivié, Guibet, lui-même qui n’ont « cessé de lutter pour donner non point aux indigènes [des possessions françaises] des droits dont ils n’ont que faire, mais seulement pour qu’ils soient traités selon la justice ». S’il est vrai qu’à la suite de ses livres sur le Congo, le gouverneur Antonetti avait grand peur que Gide se rendît en AEF, crainte qu’entretenait Coppet, à présent « depuis un an » il s’est calmé. Encore a-t-il chargé Jean d’Esme d’une mission visant « à lutter contre l’influence » des fameux livres. Marcel de Coppet détaille les mesures que le Gouverneur général a prises en faveur des administrateurs notoirement hostiles à la reconnaissance de la justice au bénéfice des Africains. Une littérature « infâme » se publie contre les thèses de Gide, informe-t-il. À la suite de quoi, une altercation a éclaté à Brazaville entre lui, Marcel de Coppet, et un administrateur des Colonies. Aussi n’est-il pas surpris, il sait de bonne source, qu’on cherche à le faire relever de ses fonctions, même si ses détracteurs n’ont, semble-t-il, pas réussi dans ce sens. Coppet dénonce la politique d’Antonetti qui se résume à « rémunérer de beaux dividendes les affaires à gros capitaux, soutenues en AEF ». Et, pour ce faire, « tous les moyens sont bons ». Certes, le signataire ne demande pas à Gide « d’intervenir ». Car « une intervention de ce genre provoquerait aussitôt des représailles ». Une seule intervention serait sanctionnée d’efficacité : « un nouveau voyage avec long séjour au Gabon, au Moyen Congo et dans l’Oubangui-Chari ». Marcel de Coppet informe, ensuite, son correspondant, des liens qu’il a noués avec Albert Thomas [voir ce nom] et Arthur Tartaine. « Ils font ce qu’ils peuvent pour améliorer la situation sans rien casser ». Ce qu’il faudrait, en définitive, « c’est le renvoi de M. Antonetti et son remplacement par un individu quelconque qui n’aurait pas besoin d’être un aigle », bref, un « honnête homme ». Seulement, précise-t-il, Antonetti a pour lui, « la compagnie des Battignolles, Octave Homberg et toute une partie de la banque judéo-protestante de Paris. Question de gros sous uniquement ». Bien qu’il envie « la tour d’ivoire » de Gide, Marcel de Coppet se dit « heureux d’être embarqué, même sur cette boue ». [Au bas de cette lettre importante et confidentielle, Gide a tracé une opération arithmétique]
Crédits
Fondation Catherine Gide