Gide, André, Lettre, 1929

En rentrant à Paris, Gide a trouvé la lettre de Mme Dana qui lui a causé du « chagrin » ; elle lui a permis de « mieux mesurer combien [son] affection [pour Émile] est déjà sérieuse et profonde ». Il s’attriste de savoir que la mère de cet enfant puisse « tenir ses écrits, livres ou lettres, pour responsable de ce que son esprit, en fermentation, comme il est assez naturel à son âge, peut présenter momentanément de rétif ». S’il va devoir inviter le jeune homme à la soumission, c’est qu’il se soumet lui-même à la demande qui lui est faite. Il doute du préjudice que ses livres pourraient avoir sur le jeune homme, car de toute façon, « Émile aurait vite compris que [ses] livres ne proposent pas en exemple ceux dont [il] a pu peindre les erreurs ou les excès, mais au contraire avertissent ou mettent en garde celui qui sait bien les lire ». Il informe la mère qu’une lettre pour Émile est partie avant que ne lui parvienne celle qui l’exhorte à cesser toute relation avec son correspondant. Et puisqu’il sera conduit au silence, il espère que ce dernier ne le prendra pas pour « négligence », « indifférence » ou « oubli ». L’« abstention […] réclamée » n’est que la « preuve de son amitié pour lui ».