Gide, André, Lettre, 1929

Type de document
Lettre
Cote
E-03-bj
Description

Lettre d’André Gide à M. Dana père, du 2 septembre 1929, envoyée de Paris, 4 feuillets dactylographiés

Détails

Auteur(s)
Expéditeur
Date
Type de texte
Dactylographie
Notes

Gide s’excuse de « la liberté [qu’il] prend d’écrire [à M. Dana] ». Si ce dernier trouve cette liberté « déplacée », Gide justifie son geste par la demande d’Émile. Et « s’il peut paraître qu’[il] prenne en telle considération les vœux d’un enfant si jeune encore », que M. Dana « comprenne pourtant qu’il ne tient pas à décevoir la confiance [que cet enfant] a mise en [lui] ». Gide affirme qu’il reçoit « souvent des lettres de très jeunes gens », et s’il n’y répond pas toujours, il a fait une exception envers le jeune Émile, car « dès la première lettre qu’il [lui] écrivit spontanément, il [lui] a semblé marquer une intelligence peu ordinaire, une singulière maturité de jugement, un touchant désir de s’instruire et de ne pas laisser gâcher sa vie ». Que M. Dana se tranquillise : Gide se « garde soigneusement d’encourager [chez Émile] des velléités littéraires et de flatter des goûts qui peuvent amener aux pires déboires, comme [il l’a] vu par de trop nombreux exemples ». Aussi, sachant qu’Émile est sur le point d’être élève au lycée Lakanal, « où il pourra entretenir le sentiment d’une supériorité littéraire trop facile sur des camarades de classe tournés presque uniquement vers des considérations d’ordre plus pratique […] », il suggère des lycées réputés pour leur « enseignement de qualité supérieure à celle qu’il pourrait trouver » dans l’établissement susnommé. Il cite ceux-ci : « Henri IV, Louis-le-Grand ou Janson ». Y connaissant « intimement quelques professeurs », Gide assure « qu’Émile [y serait] surveillé, conseillé, guidé… car [il] craint un peu de le voir, si jeune encore, abandonné à lui-même et à sa fantaisie ». Or « les places à ces meilleures classes […] sont très demandées ». Émile risquerait de n’y être pas admis, sauf protection de professeur. Gide « croit être à même de lui [en] obtenir ». Il lui paraît « qu’il ne serait pas mauvais [que le jeune homme fût] examiné à l’avance, par un de ces maîtres, qui reconnaîtrait s’il doit être plus profitable d’entrer aussitôt en rhétorique, malgré sa jeunesse ». Se pose une question « fort important[e] » : il conviendrait qu’Émile ne se sentît pas seul à Paris, au cas où ses parents n’envisagent pas de s’y installer. Lui Gide, va être « appelé sans doute en mission pour accompagner [son] ami Marcel de Coppet [voir ce nom] dans la colonie du Tchad, dont il a le gouvernement ». Il craint donc « ne pas être là et de toute manière, [il] souhaite [qu’Émile eût] à Paris un correspondant […] assez puissant pour l’aider et le protéger en cas de difficultés, et qui puisse le surveiller en cas de sorties, et le réconforter au besoin ». Il eût suggéré, pour cette tâche, « une personne merveilleusement qualifiée, Mademoiselle Allégret, ex directrice du lycée Victor Dury, personne de bon grand sens et de grand dévouement ». Seulement elle « est morte l’an passé » ; aussi songe-t-il, à son frère, Élie Allégret « directeur des missions protestantes qu’[il] connaît intimement ». Il pense également, « et de préférence » à Arnold Naville, « anciennement un des directeurs de la banque Ottomane, actuellement directeur, avec son frère, de la Société financière d’Orient ». Gide croit « extrêmement prudent de mettre [Émile] longtemps à l’avance en rapport avec des gens susceptibles de s’attacher à lui et de l’aider par la suite dans sa carrière, quelle qu’elle soit, [souligné par lui] ». Parmi tous ceux d’entre eux qui pourraient être de bon conseil, il avance le nom de François Le Grix [voir ce nom], « précisément parce que lui, tout au contraire, est sans enfants, et que, un peu pour cela, [il] croit qu’il accepterait avec reconnaissance, ce qu’[il] lui demanderait bien volontiers [de la part de M. Dana] pour Émile ». Enfin Gide se met entièrement à la disposition de son correspondant. Que ce dernier croive que « la discrétion seule [l’a] retenu d’aller le trouver directement et [lui] a fait préférer de [lui] écrire d’abord. » Un seul mot ou un coup de fil « Littré 57-19 », le « ferait accourir » où que l’autre veuille fixer un rendez-vous.

Crédits

Fondation Catherine Gide