Cette année 2025 marque l'entrée des Archives d’André Gide aux Archives littéraires suisses — dont vous êtes, Stéphanie Cudré-Mauroux, la cheffe suppléante. C’est un destin original, pour un écrivain qui a représenté la France de son temps, que de connaitre une nouvelle vie à Berne, en Suisse. Comment la Bibliothèque nationale suisse accueille-t-elle ce don ?
Avec émotion, impatience et concentration ! C’est en effet un honneur inattendu, mais aussi une responsabilité, pour la Bibliothèque nationale suisse et les Archives littéraires suisses. Comment montrer notre reconnaissance à la Fondation Catherine Gide et à son président pour ce don tout à fait extraordinaire ? Et bien, en nous mettant de suite au travail, comme nous l’avons fait depuis quelques mois : le Fonds qui compte plus de 15'000 références est en ce moment entièrement nettoyé, pièce à pièce, par une conservatrice spécialisée. En parallèle, nous avons engagé un archiviste qui a pour mission de fondre les inventaires existants dans nos bases de données et de leur donner une arborescences lisible. Et nous lançons des projets de recherche ambitieux dont nous aurons bien sûr à reparler avec votre Fondation et sur ce site. Gide et la Suisse, c’est une longue histoire, biographique et littéraire. Si les références à la Suisse, au moins dans un premier temps, sont dépréciatives sous la plume de Gide – « j’invétère ma haine de la Suisse », écrit-il sur une terrasse de Champel en 1894 –, les nombreux séjours, les amitiés et les collaborations l’attacheront pourtant à notre pays. Du « vert torrent de montagne » aux bains de l’Arve, des « sources limpides » aux « lacs glacés », Gide avait pris l’habitude, d’abord sur prescription médicale, de se plonger nu dans les eaux suisses ; ce fut pour lui un plaisir libérateur, vivifiant et fécond (« ce miel qui coula dans mes Nourritures »…) . C’est cette exaltation énergique que je veux retenir à l’orée de notre collaboration et de nos travaux autour de ce fonds.